Opinion : Le rappeur Imposs opine sur les émeutes à Montréal-Nord
Le dimanche 10 août au soir, des émeutes éclatent à Montréal-Nord impliquant des jeunes. Tout de suite les gangs sont visés. Mais qu'est-ce qui s'est passé?
Samedi soir, Dany Villanueva jouait aux dés avec son frère et un groupe d’amis dans le stationnement du parc Henri-Bourassa quand deux policiers du poste 39, à Montréal-Nord, sont intervenus. Voulant procéder à l'arrestation de l'un d'entre eux, en l'occurence Dany Villanueva qui a été maîtrisé et qui se trouvait par terre. Un des policiers n'a pas hésité à exécuter de 4 balles Fredy Villanueva, le frère de ce dernier qui a tenté de demander des explications sur l'arrestation.
Cette affaire a mis le feu au poudre à Montréal-Nord, déjà ciblé par les autorités québécoises comme zone sensible. Comme quoi, toute violence d'état, obtient nécessairement une réponse des citoyens même sous forme d'émeutes. L'histoire du Québec se met à la mode.
Imposs est un Haïtien de 27 ans, de son vrai nom Stanley Salgado. Il est membre de Muzion le groupe de hip-hop reconnu pour ses chansons engagées. Voici ce qu'il a confié dans une interview avec Nathalie Petrowsky, journaliste de la Presse.«La question n'est pas de savoir si on est pour ou contre les émeutes, mais d'essayer de comprendre leur source. Et la source, c'est que le Québec a peur de perdre son identité et, de ce fait, a peur d'intégrer les autres dans sa culture. J'ai écrit une chanson là-dessus, qui dit: entre mon monde et le vôtre, y'a un grand écart. On a beau croire que la société québécoise n'est pas raciste, le rejet qu'on vit est plus fort qu'il en a l'air. Passe encore quand tu te fais arrêter sans raison par les flics. Mais quand tu te cherches un job ou un logement décent, ce rejet devient criant.»
Il a aussi parlé de sa vie comme jeune issu de la communauté haïtienne élevé dans le quartier de St-Michel. «Mon histoire est celle de tous les Haïtiens nés ici. Ma mère s'est saignée pour que j'aille au collège Jean-Eudes, mais c'est pas évident pour un fils d'immigrant de fréquenter le même collège que les fils de riches pour qui t'es un moins que rien. J'ai fait des conneries et j'ai dû partir. À force de te faire dire qu'on te tolère, à force d'entendre Retourne dans ton pays, à force de voir tes parents travailler comme des chiens pour payer le loyer d'un apart dégueulasse, tu sens le désespoir et la rage te gagner. Moi, j'ai été chanceux, à cause de la musique, j'ai pas eu le temps d'être happé par la rue. À l'adolescence, quand mes amis m'appelaient pour faire des mauvais coups, combien de fois je leur ai répondu: Pas tout de suite j'ai un texte à finir. La musique c'est une passion, c'est la liberté, mais c'est surtout une porte de sortie.»
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